Carême 2022 – Vendredi de la 2e semaine de Carême – 18 mars 2022
Réflexions quotidiennes du Carême 2022:
Vendredi de la 2e semaine de Carême (2022-03-18)
La méditation correspond bien à la nature de la vie, qui est un voyage dans lequel nous ne nous arrêtons jamais totalement. Il y a beaucoup de hauts et de bas, des périodes de lutte intense et des moments de détente et de plaisir. Mais parce que nous sommes des passagers sur le fleuve du temps, nous sommes toujours en mouvement. Comme pour tout voyage, nous avons besoin d'être guidés, parfois rassurés, d'être accompagnés et d’avoir de la nourriture pour le voyage. Et du sens : car en l’absence de sens, nous ne sommes pas des pèlerins mais errant sans but.
Le désert, avec ses oasis et son étrange fertilité, a souvent servi à décrire l'aspect intérieur du voyage de la vie. En nous rappelant la manne dans le désert de l'Exode, nous pouvons considérer le mantra comme notre manne, tout comme beaucoup considèrent l'Eucharistie comme "notre pain quotidien".
Le mantra, comme la substance légère et floconneuse de la manne, ne semble pas être un festin substantiel. À juste titre dans un sens, car dans la dimension intérieure du voyage humain, comme dans le monde relationnel de la physique quantique, nous sommes soumis à des lois différentes. Ici, un festin peut être une famine et la faim un festin. Ici, la pauvreté est la clé du trésor du Royaume. Ici, le lâcher-prise est le moyen sûr d'atteindre notre objectif. Ici, même la mort est la porte vers une plénitude de vie. L'échec se transforme en épanouissement grâce aux nombreux ressorts cachés de la grâce.
Le méditant apprend à chaque instant à vivre avec le paradoxe, quoi que nous puissions endurer ou apprécier.
Nous répétons doucement le mantra, en apprenant à l'écouter avec toute notre attention, plutôt que de le brandir comme une arme de contrôle de l'esprit, manipulée par notre volonté. Le mantra, dans sa simplicité et sa délicatesse, est un levier qui déplace la montagne de l'ego. Tout méditant qui a développé une pratique, aussi imparfaite qu'elle puisse lui paraître, a appris à s'abandonner volontairement à la réalité, même si cela implique de renoncer à de nombreuses illusions chères.
Demandez à un méditant de longue date pourquoi il pratique et il aura souvent du mal à répondre, au début. Par où commencer ? En revanche, tout méditant pour qui la pratique quotidienne est devenue un élément du voyage intérieur, qui prend place dans le travail de la vie quotidienne, dira que "c'est un cadeau".
C'est le sens de la manne qui tombait gratuitement, quotidiennement du ciel (deux fois plus le jour du Sabbat). Elle était la même pour tous et ne pouvait pas être thésaurisée. Elle ne pouvait être reçue que par ceux qui la considéraient comme un don prouvant l’égalité entre tous. Elle a donc percé un espace de perception au plus profond de la nature de la réalité. Elle montre que chacun d'entre nous est destiné au même degré de bonheur, mais que celui-ci prendra des formes différentes pour chacun. Elle "procure tous les plaisirs et convient à tous les goûts". Et pourtant, elle n'est pas à vendre. Elle est, comme notre être lui-même, un pur don.
Loi de Dieu, unique pour chacun : Dieu ne reprend jamais un cadeau. Loi deux-en-un : le don de Dieu inclut les moyens de l'accepter.
Laurence Freeman OSB