La lecture de Jean Cassien me fait toujours penser à la prière qui plaisait à Jésus lorsqu’Il parle du pécheur qui se tenait au fond du temple et avait pour seule prière : « Mon Dieu, aie pitié du pécheur que je suis. » Il rentra chez lui « justifié », nous dit Jésus ; alors que le pharisien qui était debout dans les premiers rangs et priait de façon voyante avec de belles paroles ne trouva pas son approbation (Lc 18, 9-14). Tout l’enseignement de Cassien sur la prière est fondé sur les Évangiles : « Dans vos prières, ne rabâchez pas comme les païens : ils s’imaginent qu’en parlant beaucoup ils se feront mieux écouter. N’allez pas faire comme eux : car votre Père sait bien ce qu’il vous faut, avant que vous le lui demandiez (Mt 6, 7-8). »
Comme je l’ai suggéré, la prière ne consiste pas tant à parler à Dieu qu’à L’écouter, ou à être avec Lui. C’est cette compréhension simple de la prière qui sous-tend le conseil que Jean Cassien adresse à ceux qui veulent prier, écouter, de devenir silencieux et immobiles par la répétition incessante d’un court verset. Cassien avait reçu cette méthode comme une pratique déjà ancienne et bien établie à son époque, et il s’agit d’une tradition durable et universelle. Mille ans après Cassien, l’auteur anglais du Nuage de l’inconnaissance recommande la répétition d’un petit mot : « Il nous faut prier dans la hauteur, la profondeur, la longueur et la largeur de notre esprit, écrit-il, non avec beaucoup de mots, mais avec un petit mot (Le Nuage de l’inconnaissance, op. cit., ch. 39). »
Un mot dans le silence, un mot pour méditer