Méditation chrétienne du Québec et
des régions francophones du Canada (MCQRFC)

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Carême 2023 – Premier dimanche de carême – 26 février 2023

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Réflexions quotidiennes du Carême 2023 :

Premier dimanche de Carême (26 février 2023)

 Jésus fut conduit au désert par l'Esprit pour être tenté par le diable (Mt 4,1).

Il semble que le sens premier du mot "tentation" soit simplement "essayer quelque chose, aller voir de quoi il s’agit". Comment apprendre autrement ? Peut-on reprocher à Eve d'avoir goûté au fruit défendu ? Qui nous dit ce qui est interdit et ce qui est permis ? Dieu ou notre image de Dieu ?

Et si nous ne devions jamais faire ce qui est interdit ? Grandirions-nous un jour, les yeux ouverts sur la différence entre le bien et le mal, le réel et l'irréel, afin de faire la différence par nous-mêmes ? Le diable est le maître de la division et du doute, et les questions ne manquent donc pas lorsque nous entrons dans la tentation. Nous nous interrogeons sur la motivation de ce qui est interdit et sur notre propre motivation à risquer la désobéissance. Nous prions pour ne pas être tentés. Mais nous sommes aussi attirés par la tentation parce qu'elle nous teste et nous apprend où nous sommes vraiment prudents et forts et où nous sommes simplement effrayés et faibles.

Le désert est un endroit sans arbres, sans l'arbre de vie ni l'arbre de la connaissance du bien et du mal qui, selon la Bible, se trouvent au centre innocent du jardin d'Eden. Mais ces arbres séduisants sont en dehors de nous, séparés de nous, et nous avons l'impression d'être tentés par une force extérieure. Enfant, j'étais fasciné par les dessins de mon livre de religion où l'on voyait un bon ange qui me disait "ne fais pas ça" et un mauvais ange, de l'autre côté, qui m'incitait "vas-y, fais-le". La dualité de tout cela semblait très simple, mais en fait, elle était trompeuse.

J'ai parcouru un jour en train pendant trois jours la plaine australienne de Nullarbor. Comme son nom l'indique, c'est un désert sans arbres que j’ai trouvé insupportablement ennuyeux à regarder pendant si longtemps. Pas de beaux panoramas, de belles côtes ni de collines. Mais j'ai vite découvert combien il était varié et subtilement beau dans sa simplicité radicale et sans fin. En fait, c'était étonnamment beau. Jésus jeûna pendant quarante jours dans un tel désert, alors que son esprit était à court de souvenirs, que ses désirs étaient déracinés et qu'il se retrouvait face à la source de la division en chaque esprit.

C'est précisément pour cela que l'Esprit - qui est non duel et simple, au-delà des questions et des doutes - l'avait conduit au désert. Maintenant, l’esprit vide, il était prêt. Avoir ainsi l’esprit vide est un état plus avancé sur le chemin de la conscience de soi que d'être attentif. Nous ne regardons pas les choses pour les désirer ou y résister, car nous ne regardons rien. Les tentations extérieures - non seulement ce qui est sensuel mais aussi la sensualité de l'ego que sont le pouvoir, la célébrité et la richesse sous leurs nombreuses formes - nous maintiennent enfermés dans la vision diabolique de la division du monde. Dans le magnifique dépouillement du désert sans arbres, lorsque l'esprit n'est pas distrait, nous rencontrons la cause première de la tentation dans notre moi divisé. (Saurons-nous jamais comment elle s'est divisée d'elle-même, si ce n'est par un mythe de la création ?)

Renforcé par son jeûne de la pensée et de l'imagination, et non affaibli par cela, Jésus n'a aucun mal à balayer les dernières illusions de pouvoir et de désir ni l'illusion finale de l'existence indépendante qu’offre le diable. Libre, un en lui-même et un avec tous, comme après lui les moines du désert, il retourna dans le monde en sachant ce qu'il était appelé à faire et en découvrant qui il était vraiment.

Laurence Freeman, OSB

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